lundi 8 septembre 2014

Métamorphoses

Film de Christophe Honoré, 2014.


Des démiurges qui ne fleurent pas la rose.


Christophe Honoré s'amuse à transgresser les codes du cinéma. Pourquoi pas. C'est dans l'air du temps. Du coup, pas franchement si original. Pourtant certains réalisateurs s'en sortent très bien et proposent des formes innovantes entre réel et fiction, tout en restant émouvantes. Sauf que pour s’adonner à ce genre-là, il faut un propos qui tienne la route, et le talent pour le mettre en œuvre.

Ici, rien de tout ça. Non seulement, les plans de paysage d'une lenteur et d'une laideur affligeantes nous plongent dans une torpeur végétative et ce, de façon précoce, mais en plus rien ne nous est raconté.

Il faut avoir une prétention démesurée pour s'imaginer pouvoir reprendre Les Métamorphoses, long poème épique latin d'Ovide, de l'an 1 - une œuvre de près de
12 000 vers écrite en hexamètres dactyliques - et la transposer à notre époque. Attention, pas n'importe où, dans une banlieue du sud de la France des plus moche, où des adolescents, collégiens affreux et pas très propres, endossent le rôle de divinités de la mythologie grecque, pour la plupart très connues d'Œdipe, Tirésias, Argus, Philémon, Jupiter, Junon, etc.

Aucune direction d'acteurs évidemment. D'ailleurs, acteurs, ils ne le sont pas et, d'effort pour nous le faire croire, il n'y en a pas. Non seulement ces ados sont terriblement laids, mais en plus ils jouent extrêmement mal. En fait, ils ne jouent pas. Ils se laissent vaguement porter par le vent. Beurk.
Heureusement qu'ils se transforment parfois en génisse. Seule être vivant du film incarné et doté d'une lueur d'intelligence. Le plus du film réside donc là, dans ce choix très judicieux d'une génisse de toute beauté.


De quoi s'agit-il alors ? D'un cinéma français "jeune", "anti-bobo", qui veut encore sortir du cadre affreusement "dégueulasse" (on veut nous ancrer ça dans le crâne) de la fiction travaillée et sublimée du 7ème art qui nous faisait rêver ou du moins nous transportait quelque part.

Là, il n'y a pas de message. Il y a : des adolescents à poil durant presque deux heures, faisant l'amour un peu partout dès qu'ils le peuvent. Des corps sans grâce, des dieux et des déesses sans âmes, des interactions vaines et finalement complètement factices. Quant au langage... on est loin de la poésie. On l'aura compris très vite.

Pour nous parler de la banlieue encore, pour casser les barrières du genre et entre les genres toujours, pour éduquer la plèbe certainement, pour illustrer la mutation adolescente - ce passage difficile, ingrat où l'infant devient adulte et se pense à la fois et le plus laid et le plus fort. Des dieux et des déesses au rabais. Et au ras des pâquerettes, au plus près du bitume.


Encore pour ne rien nous dire. Et le dire très mal.

Il serait temps de mettre un terme à cette pauvreté pédante - tentative (impuissante) d'intellectualisation pour pallier le manque de créativité, et qui contrecarre systématiquement toute velléité d'imagination.

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